Racha Baroud

Depuis plusieurs années, Racha Baroud explore la notion d’héritage inconscient tant au niveau intime que performatif. Avec le temps, elle est devenue de plus en plus sensible à la dramaturgie des corps, à ce qu’ils dégagent naturellement, ce qu’ils racontent hors de toute intention, à ce qu’ils portent en eux. Elle les observe comme on contemple un paysage, tente de lire les traces de leur vécu à travers leur posture, leur mouvement, leur rythme, leur respiration, leur voix, leur regard car au final, nous sommes tous le fruit à la fois d’un vécu et d’un héritage dont nous ne sommes pas toujours conscients.
Aujourd’hui, c’est dans le cadre de l’hôpital psychiatrique de Malévoz et en collaboration avec les patients qu’elle compte approfondir et ouvrir sa recherche. Tout au long de sa recherche, elle tentera de devenir à la fois moteur, réceptacle, et révélatrice d’une phrase corporelle et vocale crée avec les patients. Le travail ne consistera pas en l’analyse psychologique de traumas, mais plutôt de faire émerger la matière et de la laisser se déployer, avec comme credo ce vieux proverbe chinois « Si le fou préserverait dans sa folie, il rencontrerait la sagesse ».

« Dans ce travail, je porte une attention particulière au sentiment d’invisibilité parfois ressenti dans le regard de l’autre. Quelles traces persistent dans l’effacement de soi pour exister aux yeux d’une société qui tend à nous rendre invisibles ?

C’est en dehors des discours rationnels et des concepts maîtrisés par ceux dits « normaux » que je tente de nourrir cette réflexion. »
– Racha Baroud

Racha Baroud
Racha Baroud est une performeuse et metteuse en scène Libanaise. Elle monte son premier spectacle en 2015, Aujourd’hui c’était mon anniversaire, un hommage musical au théâtre de Tadeusz Kantor. En 2020 suite à l’explosion du port de Beyrouth, elle co-réalise le documentaire Ali, Hachem et Khaled avec Roy Arida. En 2022, elle présente à Beyrouth son dernier spectacle Et si ces larmes n’étaient pas que les miennes ?

Cette résidence bénéficie du soutien de Pro Helvetia Le Caire et de Malévoz Quartier Culturel.


Cie Dô

Aller à reculons, c’est cheminer à contre-courant. Cette exploration amène à interroger une habitude, celle d’aller vers l’avant, et à déconstruire le rapport à l’espace induit par le sens habituel de la marche. En effet, au quotidien, la marche a une visée fonctionnelle : aller d’un point A à un point B. Dans une modernité où le flâneur trouve difficilement sa place, avancer à reculons est un geste fort : il se pose à l’encontre des exigences de productivité. 

Dans le processus de recherche, l’artiste s’imprègne de la rencontre avec les obstacles du milieu urbain, qui surviennent dans le dos. Elle explore les états émotionnels que cela induit, mais aussi les possibilités de jeu et d’improvisation. Des changements de direction, d’états de corps, d’énergie, de rythme, et de texture en émergent. 

Aller à reculons induit un autre rapport au temps, à l’espace, aux autres. Puisqu’on ne peut anticiper son chemin par l’usage de la vue, on accepte un peu plus l’imprévisible. Comment avancer malgré un certain état intérieur : jouer avec ou s’en déjouer ?  

La composition joue avec les inversions et la répétition des motifs. Au prisme de ce concept, le lexique et la technique du break permettent de travailler le poids du corps et les chutes, avec les surprises, les élans et les chemins qu’elles ouvrent.

Ce projet est sélectionné pour les Chorégraphiques#9 du 10 au 14 janvier 2024.


Elodie Chhor
Danseuse hip hop d’origine khmer, née en région parisienne et vivant à Genève, Elodie Chhor pratique le breaking (bgirl). Elle est deux fois semi-finaliste de la compétition mondiale RedBull BC One en Suisse romande. Elle a suivi la formation supérieure en danse EDHA dirigée par Imad Nefti, dédiée à accompagner les danseurs hip hop vers la création en danse. Ayant beaucoup pratiqué le break dans la rue, sur plusieurs continents, elle explore dans ses recherches artistiques les relations entre l’individu et l’espace qui l’entoure et le traverse.  

 

La Manufacture

L’action littérale : comment travailler un texte sans qu’il nous fige

Ce projet de recherche se propose d’étudier la direction d’acteur·ice dans son rapport non explicatif et non analytique à un texte. Il s’agit de différer le sens, en considérant d’une part que le jeu exige d’autres moyens qu’une enquête sur « ce que ça veut dire » et d’autre part que le travail de répétition permet une approche non prédéterminée du langage. L’action littérale ouvre des pistes d’expérimentations originales pour court-circuiter des habitudes d’interprétation textuelle. En expérimentant la direction à vue, et en s’attachant au premier degré pour inciter le corps à se mettre en mouvement, il s’agira de relever le vocabulaire employé pour la direction d’acteur·ice et le déplacement des corps dans l’espace. Le travail se fera à partir du texte Devant la parole de Valère Novarina, se fondant sur les possibles du « pré-expressif » et de l’adresse pour l’acteur·ice.

Ce projet s’intègre au programme de recherche dirigé par la Manufacture.

Photo : (Détail) La Cantate des mots camés (1971-1977) in François Dufrêne, Édition museuserralves, Museo de Arte contemporânea, 2007, p. 162.